UN BAPTEME PEU ORDINAIRE
Jusqu’à maintenant, je n’avais trouvé dans la consultation des registres BMS (Baptême/Mariage/Sepulture) que des actes relatant ces évènements. Rien que de très commun en quelque sorte. Mais voilà qu’en recherchant ma généalogie maternelle, j’ai trouvé dans le registre de 1764 de COGNIN-LES-GORGES, petite commune de l’Isère, un acte étonnant : le baptême d’une cloche !
Le curé de la paroisse apporte ici son témoignage sur un évènement local d’importance :
DANS LA MARGE, LA MENTION “BAPTEME” COMME POUR UN INDIVIDU
Aujourd’hui trentième juillet 1764 par la permission de Monseigneur de Caulet évêque et prince de Grenoble, j’ai bénie la grosse cloche de cette paroisse pesante de huit quintaux et placée le même jour au clocher.
Le poids de la cloche
Avant de faire partie du système métrique, en 1812, et de peser 100 kilogrammes, le quintal historique valait 100 livres, soit 48,951 kilogrammes. La cloche de COGNIN pesait 391,6 kg….
DEUX ANS AUPARAVANT…
Elle se cassa en 1762 au seconde de vêpres le jour de l’assomption de dame patronne de la ditte parroisse.
LA CLOCHE MARIE LOUISE JUSTINE
A été marraine Dame Marie Louise Justine de Saniaud veuve de Messire Joseph du Breuilhelion de Combes, brigadier des armées du Roi et chef du corps royal de l’artillerie. La ditte dame m’a fait l’honneur de me choisir pour le parrain, l’ayant prier d’en vouloir être la marraine, la cloche porte son nom de Marie Louise Justine.
QUE SAIT-ON DE LA MARRAINE ?
Cette dame est très vertueuse et charitable aux pauvres et trés zélez pour la rénovation des Eglises, elle m’a donné du linge et des ornemans, aussi est elle bienfaitrice de mon eglise, et par reconnaissance j’ai toujours fait dire un pater et un ave pour elle et pour les autres bienfaiteurs de la ditte église, c’est pourquoi je suplie mes successeurs de continuer de faire la même prière et de la recommander à Dieu au sacrifice de la messe pendant sa vie et après sa mort, et le pria aussi pour feu messire son mari.
UNE CEREMONIE D’IMPORTANCE
Le tout fait en présence de messire charles Chabert curé de Beaulieu x du canton de vinay, d’Enemond Millin curé de vinay, de françois Boissaux curé de Têche, de françois Pierre la Salle curé de Rovon de N.Mallen curé de Rovon et du R.P(révérend père) Hylaire prieur des augustins de vinay.
Fays curé de Cognin
Sources : COGNIN-LES-GORGES/BMS collection communale 1763-1792
LA CLOCHE, COEUR DE LA VIE LOCALE
Le fait de retranscrire cet évènement montre son importance : si besoin en était, il suffit de de se reporter à la liste des présents.
Comme le dit Alain CORBIN dans « Les cloches de la terre : paysage sonore et culture sensible dans les campagnes au XIXe siècle », la cloche rythme la vie rurale, sa sonnerie est le système de communication qui traduit les évènements locaux.
L’HISTOIRE CONTINUE !
A la suite du dernier baptême de l’année, le 26 décembre 1764, le curé Fays ajoute une page sur la Construction du clocher
{{Information |Description=La vieille église de Cognin-les-Gorges. |Source= |Date=Samedi 14 février 2009 |Author=Binnette |Permission=Own work, copyleft: Multi-license with GFDL and Creative Commons CC-BY-SA-2.5 and older versi)
Cette année le clocher a été fini par des ouvriers italiens, la flèche est malfaite, étant trop basse, ils n’ont pas suivi leur parfait en entier.
« Fait et parfait » c’est-à-dire entièrement terminé
UN PROJET CONTRARIE…
Il y avait plus de vingt ans, que j’en avais formé le projet et fait faire une partie des pierres angulaires mais l’esprit de discorde saisit quelques habitants mal intentionnés qui gagnèrent les autres pour s’y opposer.il fallut céder au tems sa presence et l’espérance d’en venir à bout.
OU L’ON RETROUVE LA CLOCHE
La grosse cloche qui se cassa au second coup des vêpres de nd (notre dame) d’aout en 1762 m’en fournit l’occasion. Il fallut la refondre et l’augmenter, et comme elle s’était rompue par le mauvais état du clocher qui n’était qu’un simple mur a quatre fenêtres, avec des arches de fers, je ne voulus point souffrir qu’on remit la cloche au même endroit, soit parce qu’elle ne serait jamais en assurance, soit parce que le clocher n’était point solide, soit parce qu’il pleuvait sur la table de la communion, soit parce qu’il fallait monter très souvent sur le toit au moindre besoin. Il fallut tenir ferme et je m’y engageay, moyennant les … que les paroissiens feraient de faire tout le reste ce que j’ai exécuté avec le secours de Dieu.
DES TRAVAUX PRELIMINAIRES
J’avais auparavans fait faire le frontispice de l’Eglise et la gênoise (La génoise est une frise composée de tuiles canal sous le rebord du toit servant à éloigner du mur les eaux de ruissellement), le plafond, l’œil de bœuf et agrandir les fenêtres pour les vouloir égales ; le perron devant l’Eglise, le portail, les degrès (les marches) et le mur de séparation du cimetière. Quant au toit de l’Eglise et de la cave, il a été fait il y a douze ou quinze jours, aux frais des habitants mais avec des pierres tufinisées : pour les y obliger. Le toit ancien de l’Eglise et celui de la cure tombaient sur le mur de séparation dans un conduit de pierre qui versait les eaux sur la porte de la cure. Les pierres n’étaient point augmentées ainsi le mur de séparation se gattait entièrement.
HAPPY END !
Il n’est pas chicane qu’on ait fait pour s’y opposer, le seigneur leur pardonne leur mauvaise volonté comme je leur pardonne de tout mon cœur.
Sources : COGNIN-LES-GORGES/BMS collection communale 1763-1792